Le HUSKY de SIBÉRIE



















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Photos: Clément Morin
Textes: Lyse Savard
Chiens: Élevage SEADREAM
Voir les éleveurs de cette race.


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LE MARATHONIEN DES GLACES

À quatre mois, Nika déborde d'énergie. La porte laissée entrouverte captive son imagination. Sans hésiter, la voilà partie à la découverte du monde, traversant miraculeusement la rue. Inconsciente du danger, Nika profite de sa liberté. Heureusement, un bon samaritain la remarque et met fin à son escapade en l'amenant avec lui.

Après quelques jours d'inquiétude et grâce aux pancartes « Perdu chiot husky » placardées un peu partout dans le voisinage, les maîtres chanceux retrouvent leur chienne. Les aventures de Nika finissent bien d'autant plus qu'elles auraient pu lui coûter la vie.

Depuis son origine, le Husky de Sibérie est un voyageur. Pas surprenant que déjà, à quatre mois, la curiosité de Nika l'emporte sur la prudence Devenue adulte, l'appel des odeurs et des bruits inconnus restera aussi vif. La curiosité intellectuelle propre aux chiens de cette race les force à explorer la nouveauté et à rechercher l'inhabituel.

Le coureur
Si le Husky performe si bien attelé au traîneau, c'est en partie parce que chaque kilomètre parcouru lui permet d'en découvrir de nouveaux. Comme son nom l'indique, il est originaire de Sibérie. Malheureusement, les archives de Russie révèlent peu d'information sur son histoire. On sait qu'il fut développé par la nation esquimaude Chukchi qui l'utilisait pour tirer des traîneaux et garder les rennes.

La ruée vers l'or l'a fait connaître en Amérique. Dès leurs premières expéditions, les jeunes prospecteurs ont vu leurs aspirations brisées par les rudes hivers du Yukon et de l'Alaska. Ils se sont mis à la recherche de chiens capables de tirer de lourds traîneaux combles de leur attirail de prospection. Par l'intermédiaire des trappeurs, ils découvrirent les chiens utilisés par les Inuit et parvinrent à s'en procurer quelques spécimens. Il ne s'agissait pas de Husky, plutôt des types de Malamutes. Mais la découverte de ces chiens consacra le chien de traîneau qui devint aussi précieux que les pépites d'or. Avec les chiens de traîneau, apparurent les « mushers » qui s'employèrent à développer les qualités essentielles de leurs chiens, soit la vitesse et l'endurance.

Rapidement, les mushers voulurent comparer leurs attelages respectifs et organisèrent des courses qui furent à l'origine des grands exploits sportifs d'aujourd'hui comme l'Iditarod. L'essor des courses entraîna la découverte du Husky. Un trappeur norvégien, Olaf Swenson en importa de Sibérie. Un marchand de fourrures russe, William Goosack en rapporta quelques-uns qu'il inscrivit dans l'épreuve « All Alaska Sweepstakes ». On raconte que sur la ligne de départ, ses chiens suscitèrent les rires des spectateurs. Ils étaient si petits qu'on ne pouvait imaginer qu'ils aient suffisamment de force pour terminer la course. Mais ces boules d'énergie terminèrent troisième, ce qui leur attira aussitôt le respect. Le Husky s'imposa en 1910 en pulvérisant tous les records de l'épreuve. Vint ensuite le plus grand musher de tous les temps, le Norvégien Leonhard Seppala. En janvier 1925, le village de Nome en Alaska fut victime d'une épidémie de diphtérie. Les 1 450 habitants risquaient tous d'en mourir à moins que des médicaments leurs parviennent d'Anchorage. Le train les rendit jusqu'à Nenana. Restait encore plus de 1 000 kilomètres à franchir. Dix-neuf attelages de Husky se relayèrent. Seppala était parti de Nome dans le froid intense. Finalement, grâce au chien de tête Balto, appartenant au musher Gunnar Kasson, le dernier attelage atteignit Nome dans l'obscurité et la neige. Dans la lancée de cette victoire contre la mort, Seppala partit en tournée et le Husky de Sibérie conquit le Canada et les
États-Unis. Il fut reconnu par le Club Canin Américain en 1930 et en 1939
par le Club Canin Canadien.

L'arrivée des motoneiges a remplacé le traîneau à chiens. Encore utilisé à des fins de loisirs, le Husky reste toujours un coureur infatigable.

L'INCOMPRIS
Peu de chiens sont aussi méconnus que le Husky. Son aspect sauvage, son regard étrange et sa ressemblance au loup suscitent souvent des craintes injustifiées. Malheureusement, le Husky est encore victime de l'ignorance de personne bien intentionnée qui lui refuse la possibilité d'être offert en adoption dans certains refuge sous prétexte qu'il est croisé avec un loup. à cause de son apparence, la méprise est facile. Pourtant, le Husky n'a pas plus de lien avec cet ancêtre lointain qu'en ont les autres races de chiens. En fait, il n'y a pas plus amical que le Husky. Il faut savoir que dans leurs villages isolés de Sibérie, les Chukchis ont développé cette race de façon à ce que leur chien ne démontre aucune agressivité envers les étrangers en quête d'hospitalité..

L'épithète la plus souvent accolée au comportement du Husky est « indépendant ». Par ailleurs, cette indépendance n'est pas synonyme de solitaire. Certes, son côté fugueur requiert une certaine dose d'indépendance. Pour partir à l'aventure, il faut faire preuve d'autonomie. Pour tirer un traîneau, éviter les obstacles et mener son musher à destination, il faut pouvoir décider seul. Mais en y regardant de plus près, le Husky est avant tout un chien grégaire. C'est une race qui doit à tout prix s'identifier à une meute. Habitué à travailler en groupe, il est extrêmement malheureux seul. Pire, la solitude le rendra gêné et nerveux. Si son maître doit s'absenter régulièrement, il est préférable de le laisser en compagnie d'autres chiens. Le Husky aime être entouré, de monde ou de chiens, peu lui importe du moment qu'il ne s'agit pas de chat, une espèce pour laquelle il ressent généralement un profond dédain. En fait, toutes petites bêtes éveillent en lui son instinct de chasseur toujours très présent.

VIVRE AVEC UN HUSKY
Le Husky est avant tout un gentil chien. Il aime jouer et, face à l'ennui, il trouvera vite moyen de se changer les idées, que cela plaise ou non à son maître qu'il perçoit comme un égal, et non pas comme un être supérieur. Le Husky est un chien vif et très intelligent. Il excelle quand vient le
temps de solutionner des problèmes et il apprend vite à contourner les « Non » qu'on s'acharne à lui répéter.

Posséder un Husky peut s'avérer un coup dur pour son amour propre. Il faut de la finesse et de la patience pour réussir à conserver un certain degré de contrôle sur son Husky. Les propriétaires de cette race le disent : « Ce chien est unique et après quelques mois, son nouveau propriétaire devra avoir recours à des soins psychiatriques ou au contraire, croira que son chien est le plus fantastique au monde. » Le Husky n'est pas un chien pour tout le monde. Soit qu'on l'aime à la folie ou que son indépendance rend fou.

Le Husky a de l'énergie à revendre. C'est un athlète. La vie pantouflarde d'un appartement ne le satisfait pas. Il a besoin de beaucoup d'exercice. Il lui faut de longues marches et il se fera un plaisir d'accompagner son maître lors de son jogging quotidien. Les randonnées en montagne lui conviennent bien. Avec un sac bien adapté, il transportera lui-même sa bouffe. Il aime l'eau. · cause de son goût de l'aventure, la laisse s'impose lors de ses promenades. Il doit avoir accès à une cour solidement clôturée et solide à la base car ses tunnels sont aussi réussis que ceux des Terriers.

Malgré sa toison épaisse, il semble qu'il dégage peu d'odeur comparativement aux autres races. Il mue deux fois par année et des brossages en profondeur s'imposent pendant ces périodes. Le Husky n'est pas un bon chien de garde. S'il annonce l'arrivée d'un inconnu en gémissant ou en hurlant, c'est d'avantage pour lui démontrer sa joie et lui souhaiter la bienvenue. Sa personnalité et sa grosseur en font un très bon chien de famille.

Arlicle complet dans le numéro: (Poils & Cie) Nov./Déc. 2000